URML Normandie

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Edito du président
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Chers Amis,

L’ensemble des élus et salariés de l’URML Normandie vous adresse leurs vœux les plus sincères pour vous-mêmes et ceux qui vous sont chers.

2022 vient de s’achever avec sur la table des enjeux essentiels pour l’offre de soins libérale :

  • au niveau national : loi de finance de la sécurité sociale 2023, ouverture des négociations conventionnelles, initiatives parlementaires répétées (obligation de permanence de soins, atteintes à la liberté d’installation, …) et annonce d’une nouvelle loi de santé,
  • au niveau régional et local : généralisation du dispositif de Service d’Accès aux Soins, réouverture du cahier des charges régional de PDSA, révision du Schéma Régional de Santé, avec en toile de fond la récente réforme des autorisations (activités, équipements matériels lourds), une situation démographique professionnelle alarmante aggravée par une perte d’attractivité et une perte de sens accentuée par la récente pandémie … mais pas que.

Le « Ségur de la Santé », presqu’exclusivement orienté que vers l’hôpital public, s’avère n’être qu’un coup d’épée dans l’eau. Les seuls moyens matériels ne sauraient répondre à une profonde remise en cause de professionnels engagés au service des autres, quel que soit leur mode d’exercice.

Dans le même temps, le secteur libéral était sommé de monter des organisations territoriales dans un cadre toujours plus contraint sur le plan réglementaire et conventionnel, sans respecter le facteur humain indispensable, d’autant plus en situation de crise sanitaire.

Sans respect du nécessaire facteur temps (de diagnostic territorial, d’appropriation du concept même de territoire, d’identification des tensions, des carences et enjeux de l’offre de soins actuelle, mais aussi des attentes de professionnels), un télescopage manifeste entre les missions socles desdites communautés professionnelles territoriales de santé et les attentes d’un service d’accès aux soins – dont, à ce jour, aucune évaluation des projets pilotes n’est disponible – a eu raison de certaines des plus fermes motivations.

Durant toute l’année 2022, les médecins libéraux ont été mis à l’index de manière outrancière par certains (comme une fédération hospitalière) leur reprochant de ne pas prendre leur part d’une permanence de soins en établissement de santé soumise à autorisations, autorisations préférentiellement voire systématiquement attribuées au secteur public ! Les médecins généralistes sont de même tenus responsables à la fois de ne pas être disponibles (alors que les soins non programmés représentent jusque 30% de leur activité hebdomadaire et que 80% d’entre eux sont déjà organisés pour recevoir ces demandes de soins non programmés) et de la saturation des services d’urgences. Sans oublier la commande ambivalente, l’injonction paradoxale faite aux médecins généralistes : travaillez (encore) plus dans vos cabinets, et dans le même temps quittez vos patients et vos cabinets pour aller faire de la régulation dans les Centres 15 ou les SAS…

2022 a vu également émerger des velléités de substitution du médecin généraliste … Si une délégation de tâche (et non un transfert de compétence) peut effectivement être discutée, elle ne saurait l’être en dehors d’une équipe de professionnels se connaissant, travaillant régulièrement ensemble et dans un cadre de protocole formalisé. Il n’est plus traitre qu’un « mal de tête » … parfois rapidement fatal. Que dire également des limites de la téléconsultation telle que promue par certains opérateurs commerciaux, y compris des assureurs de santé ? Accepter de prendre en charge un patient, c’est aussi lui assurer une organisation permettant d’assurer des prises en charge de qualité, responsables et efficaces en cas d’évolution délétère.

La conjonction de ces éléments dans une période épidémique tendue, une situation économique et sociale incertaine, un sentiment d’insécurité professionnelle, génère une souffrance que les mouvements actuels, tant hospitaliers que libéraux, illustrent. Il serait sans doute très préjudiciable de n’en faire qu’une affaire catégorielle.

 

N’aborder ces enjeux sans lever les cloisonnements systémiques savamment entretenus n’apportera aucune réponse efficace aux défis que nous affrontons. Le système de santé français est bipède, avec son secteur libéral et son secteur public. C’est sa force, n’en faisons pas sa faiblesse ! Sa force repose sur ses complémentarités en compétences au sein d’un même territoire, son agilité propre, son intelligence collective, pour peu que les professionnels de santé s’associent dans un effort commun.

Mais pour travailler ensemble, encore faut-il se connaître. Les tensions démographiques, la charge de travail de chacun, les tâches par excès (certains aspects sociaux et administratifs échoient au médecin généraliste par défaut), couplées à des difficultés organisationnelles, à un sentiment de dépréciation, voire de défiance, bref ces obstacles et ces difficultés s’additionnent sous des formes certes différentes mais aux conséquences similaires dans les deux secteurs, libéral et hospitalier.

Pour travailler ensemble, encore faut-il se respecter. Les tensions en ressources humaines de cet été et de cet hiver ont été l’occasion de sollicitations du secteur libéral … en dernier ressort, pour « combler ». N’aurait-il pas été plus efficient, dans un souci d’équité et de réciprocité, d’associer en amont les praticiens libéraux dans l’établissement des tableaux de garde du territoire, spécialité par spécialité ? C’était l’une des propositions formulées en juin dernier par la « mission Flash », mais finalement peu réalisée.

Les clivages et cloisonnements ne sont pas uniquement statutaires ; ainsi, les récents travaux universitaires sur les freins et leviers à l’installation des jeunes médecins généralistes placent-ils l’accès au second recours comme deuxième critère après les appréhensions notamment administratives. Il serait vain et illusoire d’aborder la question de l’offre de soin et de l’attractivité de nos territoires uniquement sous le prisme du premier recours sans traiter la question de l’accès au second recours, d’un réel lien entre pratique de ville et pratique en établissement.

Nous abordons donc 2023 déterminés sur trois principes : reconnaissance, équité et réciprocité.

Promouvoir l’accueil des internes de toute spécialité dans les cabinets libéraux, sortir la permanence de soins spécialisés d’une logique d’établissement pour un dimensionnement territorial, reconnaitre l’effort organisationnel – aujourd’hui invisible car non identifié par l’assurance maladie – des médecins libéraux dans la prise en charge des urgences et soins non programmés, admettre que tout ce qui est soins non programmés ne relève pas exclusivement d’une régulation 15 ou SAS, mener une réelle réflexion sur la permanence de soins ambulatoire selon les territoires et l’activité des services d’accueil des urgences, développer des vrais projets de téléconsultations assistées et augmentées, renforcer l’accompagnement des projets d’installation et l’attractivité de nos territoires, conforter l’offre de soins de second recours, notamment en donnant les moyens de leurs missions aux équipes de soins spécialisés ou aux commissions médicales d’établissements privés, … autant de travaux sur le métier.

Nous formulons le vœu de pouvoir mener à bien ces travaux, et d’autres, en fédérant l’ensemble des acteurs dans un souci constant d’une réelle prise en compte du facteur humain. Nous serons amenés dans ce cadre à vous solliciter, afin de défendre au mieux vos intérêts et attentes ; de vos réponses dépendra en partie la pertinence de nos actions.

Soyez assurés de notre plein engagement dans votre défense et représentation.

Amitiés,

Dr Antoine LEVENEUR
Président de l’URML Normandie